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Neuf civils tués dans une attaque perpétrée par l’armée à Mautu village

Cameroun : Neuf civils tués dans une attaque perpétrée par l’armée

par Human Rights Watch

Des soldats de l’armée camerounaise ont tué au moins neuf civils dans la région anglophone du Sud-Ouest le 10 janvier 2021, a déclaré aujourd’hui Human Rights Watch. Parmi les victimes figuraient une femme et un enfant, et quatre autres personnes ont été blessées. Les soldats en cause ont également pillé des dizaines de foyers et menacé les habitants.

Une capture d’écran (hrw) 

Le porte-parole de l’armée camerounaise a admis que des soldats du 21e Bataillon d’infanterie motorisée (BIM) avaient conduit une opération dans le village, tout en niant que les troupes aient tué et blessé des civils.

« Tuer des civils et piller leurs maisons au nom de la sécurité sont de graves violations des droits humains qui alimentent les cycles croissants de violence et d’abus dans les régions anglophones du Cameroun », a déclaré Ida Sawyer, directrice adjointe de la division Afrique chez Human Rights Watch. « Les autorités camerounaises devraient contrôler les unités responsables d’abus et, avec l’aide de l’Union africaine et de l’ONU, ouvrir une enquête crédible et impartiale sur les meurtres commis à Mautu et poursuivre en justice ses auteurs.»

Human Rights Watch s’est entretenu par téléphone avec 17 témoins, dont cinq proches des victimes, au sujet de l’attaque. La violence entre forces gouvernementales et groupes armés séparatistes secoue les régions anglophones du Nord-Ouest et du Sud-Ouest du Cameroun depuis fin 2016. Des groupes séparatistes opèrent dans la zone située autour de Mautu, où ils viennent parfois s’approvisionner en vivres et récupérer de l’eau, selon des habitants.

Médecins sans frontières (MSF) a soigné quatre personnes blessées par balle, dont un enfant. Human Rights Watch a obtenu les listes des neuf personnes tuées auprès de quatre sources distinctes, et s’est entretenu avec des proches et des résidents qui ont assisté aux enterrements ou transporté les corps des victimes à la morgue de l’hôpital de Muyaka. Les détails fournis par ces individus correspondent aux informations que Human Rights Watch a obtenues indépendamment d’autres témoins.

Human Rights Watch a transmis ses conclusions au Capitaine de frégate Cyrille Serge Atonfack Guemo, le porte-parole de l’armée camerounaise, dans un courriel daté du 22 janvier et dans lequel des questions spécifiques lui ont été posées. Atonfack Guemo a répondu le 26 janvier, mais sans aborder directement les questions posées par Human Rights Watch. Il a rejeté les preuves d’homicides illégaux en alléguant qu’elles étaient fabriquées, sans toutefois corroborer cette affirmation.

Des témoins ont déclaré qu’une cinquantaine de soldats, dont des membres du BIM, sont entrés à pied à Mautu le 10 janvier vers 14 heures et ont commencé à tirer sans discernement alors que les gens prenaient la fuite. Les témoins ont déclaré que les soldats ont tué neuf personnes, dont une femme âgée de 50 ans et une fille de six ans, et qu’ils se sont rendus d’un domicile à un autre à la recherche de combattants séparatistes et d’armes, menaçant les habitants et pillant leurs biens. Certains de ces témoignages ont également été confirmés par des médias internationaux et des organisations camerounaises des droits humains.

Une femme âgée de 30 ans, qui a été témoin du meurtre de son voisin âgé de 28 ans, a déclaré : « J’ai vu comment les soldats sont rentrés chez cet homme, qui vivait à côté de moi. Ils l’ont conduit à l’extérieur, l’ont frappé à coups de pied, passé à tabac à l’aide de leurs armes et à mains nues, puis lui ont tiré dessus à plusieurs reprises. C’était l’expérience la plus effrayante de ma vie. »

Dans un communiqué publié le 11 janvier, Cyrille Serge Atonfack Guemo, le porte-parole de l’armée camerounaise, a affirmé que des « groupes terroristes » avaient attaqué des soldats du 21e BIM alors qu’ils menaient un « raid préventif » à Mautu le 10 janvier, et que les soldats ont riposté en tuant plusieurs « terroristes » et en saisissant leurs armes. Mais d’après des témoins et des habitants, il n’y a pas eu de confrontation entre combattants séparatistes et soldats, puisqu’au moment de l’attaque, les premiers ne se trouvaient pas à Mautu. Les soldats ont délibérément tué des civils, affirment-ils.

« L’armée est juste venue pour nous tuer », a assuré un habitant de Mautu âgé de 32 ans. « Il n’y avait pas d’Ambas [séparatistes] au moment de l’attaque. Les soldats sont arrivés et ont tiré sur les villageois qui s’enfuyaient. Des combattants séparatistes viennent parfois à Mautu pour s’approvisionner, mais ils ne vivent pas ici et nous ne les abritons pas. Nous avons également peur d’eux. »

Les villageois ont affirmé que l’attaque a été perpétrée en représailles contre la population que l’armée accuse d’abriter et de soutenir les combattants séparatistes. Cinq témoins ont déclaré que, lors de l’attaque, les soldats se sont adressés à des dizaines d’habitants, dont des femmes, qui avaient été arrêtés au centre du village, et les avaient menacés. « Ils nous ont prévenus qu’ils reviendraient et tueraient plus de gens encore si nous ne leur montrions pas où se trouvaient les Ambas [séparatistes] », a déclaré un homme âgé de 60 ans.

Des témoins ont rapporté que le village est maintenant presque complètement vide car les gens ont fui vers la brousse ou les villes et villages voisins, craignant de nouvelles attaques par les militaires. « Il n’y a personne à proximité », a déclaré un témoin âgé de 36 ans resté à Mautu« Seuls quelques-uns d’entre nous sont restés ici. Les gens craignent le retour de l’armée. »

Dans son communiqué du 11 janvier, le porte-parole de l’armée a affirmé que des « leaders terroristes » avaient fabriqué de toutes pièces « un fatras d’images macabres » pour imputer à l’armée les meurtres de Mautu. Cependant, Human Rights Watch a obtenu six vidéos et trois photographies montrant les conséquences de l’attaque et s’est entretenue avec l’auteur des vidéos et des photographies. « Les soldats nous ont attaqués et ont tiré sans discernement sur des gens », a-t-il dit. « J’ai fui et me suis caché dans la brousse voisine. Lorsque les soldats sont repartis, je suis sorti et j’ai filmé ces vidéos. Ce sont des images réelles, montrant de vraies personnes massacrées par ceux qui prétendent nous protéger. »

Human Rights Watch a pu faire correspondre les victimes filmées avec les descriptions des victimes dont il a été établi qu’elles avaient été tuées. L’organisation a également identifié des blessures concordantes avec celles décrites par des témoins et n’a trouvé aucune preuve de l’existence de ces éléments visuels en ligne avant la date de l’attaque. Les vidéos et photographies montrent les corps de sept hommes, d’une femme et d’un enfant ainsi que de deux femmes et d’un enfant blessés. Les vidéos ont toutes été filmées en plein jour, et des flaques de sang sont visibles dans certaines d’entre elles, ce qui, avec l’absence d’insectes autour des corps, a permis à Human Rights Watch de conclure qu’elles ont bien été tournées dans les heures suivant l’attaque.

Ce n’est pas la première fois que les forces de sécurité attaquent Mautu. Selon des témoins et des habitants, des soldats y avaient mené plusieurs opérations en 2020, ainsi que le 1er janvier 2021 : ils avaient encerclé le village, fouillé et pillé les maisons, harcelé et brutalisé les gens. « Le 1er janvier, à 6 heures du matin, de nombreux soldats ont envahi notre village », a témoigné un habitant. « Ils sont entrés par effraction chez moi et m’ont regroupé avec d’autres hommes au centre du village. Ils ont dit qu’ils nous emmèneraient tous à leur base militaire à moins que nous ne leur montrions où se trouvaient les Ambas [séparatistes]. Ils ont roué de coups certains d’entre nous. Ils m’ont giflé à quatre reprises. »

Les meurtres du 10 janvier ont provoqué un tollé dans l’opinion publique et été largement condamnés, tant au Cameroun qu’à l’extérieur.


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https://www.hrw.org/fr/news/2021/02/04/cameroun-neuf-civils-tues-dans-une-attaque-perpetree-par-larmee

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